CAN-ASC-1.1 Norme sur l’emploi : ébauche pour examen public - Annexe A (à titre informatif) : Historique et contexte
Table des matières de l'Annexe A
Historique et contexte
Note : Cette annexe ne constitue pas une partie obligatoire de cette norme.
Les personnes en situation de handicap représentent 22,3 % de la population canadienne (Enquête canadienne sur l’incapacité, 2017). Historiquement, les personnes en situation de handicap ont été marginalisées dans la société canadienne, et se sont vu refuser des possibilités complètes et équitables de contribuer et de participer aux activités de leur communauté. Le terme plus large de « handicap » englobe de nombreux types de handicaps (c.-à-d. handicap lié à la santé mentale, y compris le trouble de stress post-traumatique; handicap intellectuel, physique, épisodique, ou sensoriel; trouble du développement; lésions cérébrales).
Traditionnellement, la société canadienne a été construite sur des cadres systémiques d’oppression, y compris le capacitisme systémique. Tout comme le racisme systémique, le capacitisme systémique est le résultat de siècles de préjugés et de croyances profondément ancrées sur les capacités, sur les compétences et sur les contributions des personnes en situation de handicap. Le capacitisme systémique est intériorisé par les décideurs, y compris les employeurs et les gestionnaires d’embauche, comme une forme d’exclusion des personnes en situation de handicap, et comme le sentiment que les personnes en situation de handicap ne peuvent pas accomplir les tâches qui leur incombent, et qu’elles sont « moins bonnes » que les personnes qui vivent sans handicap.
Le capacitisme systémique n’existe pas dans la société de manière isolée. En effet, il est lié à d’autres formes de discrimination systémique, car le handicap n’est qu’une partie du vécu et de l’identité d’une personne (qui comprend également la race, la culture, l’identité de genre, l’identité autochtone, l’orientation sexuelle, le degré d’assimilation à la culture canadienne, la langue, etc.). En outre, environ 20 % des adultes en âge de travailler (25 à 64 ans), soit 3,7 millions de personnes, souffrent d’au moins un handicap (Enquête canadienne sur l’incapacité, 2017). Tout le monde, y compris les personnes en situation de handicap, vit avec de multiples identités intersectionnelles, et toute norme qui détermine, qui prévient et qui supprime les obstacles pour les personnes en situation de handicap doit incarner l’intersectionnalité.
Le capacitisme systémique englobe les obstacles systémiques et structurels, à l’intérieur et à l’extérieur du lieu de travail, ainsi que différents types d’oppression (individuelle, interpersonnelle, institutionnelle, métaphorique/idéologique). Les types d’oppression comprennent les oppressions individuelles (c.-à-d. les déclarations inappropriées telles que les insultes à l’égard des personnes en situation de handicap, ou les comportements et les actions inacceptables), institutionnelles (c.-à-d. les politiques, les systèmes et les pratiques inacceptables qui sont discriminatoires envers les personnes en situation de handicap) ou idéologiques (c.-à-d. les philosophies, les théories et les idées qui vont à l’encontre des personnes en situation de handicap, telles que la vision déficitaire ou la vision pathologique).
Cette marginalisation historique s’étend à l’emploi; en 2017, le taux d’emploi des personnes en situation de handicap était inférieur d’environ 20 % à celui du reste de la population en âge de travailler (Enquête canadienne sur l’incapacité, 2017). De nombreuses personnes en situation de handicap qui occupent un emploi sont sous-employées, c-à-d. que par rapport à des personnes sans handicap, elles travaillent moins d’heures, gagnent moins d’argent et n’ont pas la possibilité de progresser dans leur emploi ou leur carrière. La COVID-19 a amplifié ces inégalités historiques; certaines études ont montré que plus de 30 % des personnes en situation de handicap qui travaillaient ont perdu leur emploi, ou ont vu leur emploi modifié de manière négative pendant la pandémie (INCA, 2020, 2021; Maroto et al., 2021).
Il est important de reconnaître les modèles médicaux, économiques, sociaux et culturels du handicap qui ont précédé la situation actuelle. Dans le modèle médical, le handicap est une caractéristique de la personne et peut être traité, guéri, ou réhabilité. Selon le modèle économique du handicap, qui aborde le handicap selon la perspective de l’économie et de la productivité, le handicap est en fait un défi en matière de productivité. Toujours selon le même modèle, les personnes en situation de handicap sont considérées comme moins productives que les autres en raison de leur vécu du handicap, c.-à-d. que l’on s’attend à ce qu’elles s’absentent davantage du travail pour des raisons liées à leur handicap ou à leur santé (« absentéisme »), et à ce qu’elles soient moins productives pour le même nombre d’heures sur le lieu de travail lorsqu’elles sont présentes (« présentéisme »).
D’après le modèle social, le handicap est le résultat des obstacles qui existent et conduisent à un environnement discriminatoire. En outre, le modèle social du handicap fournit un cadre qui met l’accent sur les capacités fondées sur une vision humaniste (c.-à-d. qu’il met l’accent sur ce dont les personnes en situation de handicap ont besoin comme mesures d’adaptation pour participer de façon égale, ou sur des fonctions efficaces telles qu’une canne blanche, du sous-titrage, ou une rampe d’accès). Selon ce modèle, un « handicap » est le résultat de l’interaction entre les personnes vivant avec des limitations et un environnement truffé d’obstacles physiques, comportementaux, communicationnels et sociaux. Le modèle social du handicap suppose donc que l’environnement physique, comportemental, communicationnel et social doit changer pour permettre aux personnes vivant avec un handicap de participer à la société au même titre que les autres. En outre, le modèle social du handicap est la manière reconnue à l’échelle internationale de considérer et d’aborder le « handicap ». Le modèle culturel du handicap, en revanche, tient compte de multiples facteurs dans la conceptualisation du handicap, et se concentre sur la manière dont les différentes idées du handicap et du non-handicap peuvent fonctionner dans une culture donnée.
La présente norme vise à réfuter les modèles médical et économique du handicap, et renforce les modèles social et culturel en mettant l’accent sur des approches proactives afin de déterminer les obstacles à l’accessibilité sur le lieu de travail, de les éliminer et de les prévenir.
Cette norme rompt avec le passé en accordant la priorité au rôle de l’employeur dans la détermination proactive des obstacles dans l’environnement de travail pour les personnes en situation de handicap, dans la prévention de ces obstacles, et dans leur élimination. Aux fins de la présente norme, l’environnement de travail comprend le cadre physique ou virtuel, ainsi que les politiques, les pratiques, la culture, les procédures, les ressources, les technologies, les services et les programmes mis en place par un employeur donné.